28 Août 2011

Grande distribution et distribution spécialisée : Bilan à fin 2010

Voici un excellent bilan à fin 2010 de la distribution généraliste et spécialisée, avec un focus spécifique des enseignes leader trouvé sur LSA et dont je souhaitais vous faire partager.

Les Bourses du monde entier peuvent bien dégringoler, la Zone euro voler en éclats, ou les États-Unis faire banqueroute dans quelques mois, les distributeurs de France ont passé une bonne année 2010. Rien ne dit que 2011 se terminera aussi bien, mais vu les revers qu'ils ont essuyés en 2008 et en 2009, ils ne vont pas bouder leur plaisir ! D'après le classement exclusif établi par le cabinet de conseil PricewaterhouseCoopers (PwC) pour LSA, 76 des 100 leaders français de la distribution ont enregistré une croissance de leurs ventes dans l'Hexagone l'an passé. Vingt de plus qu'en 2009. « Au total et à comparable, ce top 100 a vu son chiffre d'affaires augmenter de 3,8% », calcule Olivier Vialle, associé de PwC et copilote de l'étude. Ainsi, les enseignes de distribution alimentaire sont pile dans la moyenne, avec des ventes en hausse de 3,4% par rapport à 2009.

Cette progression, ou du moins ce retour à des résultats « avant crise », est à mettre sur le compte d'un effet carburants positif sur 10 à 15% du chiffre d'affaires. « Ce biais peut masquer des performances qui ont pu être faibles, notamment chez Carrefour », analyse Olivier Vialle. Avec plus de 44 milliards d'euros de ventes pour le groupe en France en 2010, les différentes enseignes du groupe Carrefour n'accusent en apparence qu'un léger recul de 1%. Mais si l'on soustrait l'impact positif des caburants et de l'expansion, le recul des ventes au mètre carré serait plutôt de l'ordre de 3%. Les hypers Carrefour sont ainsi passés de 13% à 12,5% de part de marché. Voilà qui ne fera pas gagner des points à Lars Olofsson, PDG du groupe.

La mauvaise passe de Carrefour profite à ses concurrents directs

Ses concurrents Système U et E. Leclerc ne se sont pas fait prier pour profiter des errements du géant français. En 2010, les adhérents de Serge Papin ont gagné 6,3% de chiffre d'affaires en hypers et 5,6% en supers. Mieux encore chez Leclerc, où le chiffre d'affaires France a atteint 34,8 milliards d'euros, en progression de 6,5%, et dont la part de marché a évolué dans le même temps de 18,3 à 18,8 %... soit exactement le demi-point qui manque aujourd'hui aux hypers de Carrefour. « Les groupements s'en sortent beaucoup mieux », constate Olivier Vialle, de PwC. Ce qu'Intermarché confirme avec brio, en détrônant les hypers Carrefour de la deuxième place du top ! Après une progression de 4,1% de ses ventes, il a dépassé les 25 milliards d'euros de vente en France.

Pour réussir dans le bricolage et le jardinage, il fallait être un Mulliez en 2010. Alors que le secteur a augmenté ses ventes de 476 millions d'euros (+ 2,6%), Leroy Merlin et Bricoman, les enseignes du groupe Adeo, en ont capté plus des trois quarts, soit 394 millions d'euros. Si l'enseigne Weldom ne peut pas en dire autant, avec - 9%, c'est surtout suite à la fermeture de 23 magasins. De fait, ce marché a été favorable aux réseaux intégrés. « Les franchisés ont souvent de petites unités, alors qu'avec la crise les gens veulent plus de choix, plus de prix », estime Sabine Durand- Hayes, associée du cabinet PwC. Mr.Bricolage en a beaucoup souffert, puisque ses ventes ont reculé de 4,5%. Aussi, les distributeurs qui ont pris le virage de la déco s'en sont mieux sortis. Castorama, qui fait de gros efforts dans ce sens sous la direction de Guy Colleau, a gagné 5,1%. Avec la crise, les Français raffolent des petits accessoires pour relooker leur intérieur à moindre prix. Jardiland réalise aussi un bond en avant, avec une progression de 21 points de vente qui lui permet de passer de 554 à 765 millions d'euros de chiffre d'affaires. De son côté, le marché de l'équipement de la personne semble enfin retrouver des couleurs. Durement touchées ces dernières années par un recul de la consommation, les 25 entreprises du top 100 ont réalisé des ventes cumulées de 18,5 milliards d'euros, soit une croissance de 5,3 %. Parmi ces enseignes, quatre sortent du lot. Ventes- privées, avec sa progression de 16,1%, garde un rythme de croisière très soutenu, même si elle est en retrait par rapport à 2009 (+ 24,1%). Ensuite, Kiabi et Celio impressionnent, avec des ventes respectivement en hausse de 24,1 et de 28,5%. La première récolte enfin les fruits de l'intégration du réseau Vêti (50 magasins en plus), et la deuxième récolte ceux d'une politique d'expansion vigoureuse. « Avec 110 magasins de plus en deux ans, Celio a connu deux années de croissance très rapide », analyse Olivier Vialle. Les responsables du développement n'ont pas chômé ! Enfin, Promod est passée de la 95e à la 90e place, avec 431 millions d'euros (+ 12,4%). Seuls 3 Suisses (- 2,8%) et Alain Afflelou (- 1,1%) ont connu un recul notable de leur activité.


Des évolutions contrastées

Les acteurs de l'équipement de la maison ont vécu des évolutions beaucoup plus contrastées. À commencer par Saturn. Après une baisse de 16 % de son activité, l'enseigne apparaît pour la dernière fois dans ce classement, rachetée depuis par son concurrent Boulanger. Côté ameublement, But et Conforama ont confirmé leur regain de santé avec des progressions de 7,4 et de 4,8%. Leurs concurrents en ont visiblement souffert, puisque Ikea (+ 2,4%), Alinéa (+ 3,3%) et Fly (- 0,3%) ont subi des baisses substantielles de leur chiffre d'affaires au mètre carré. Ils réussiront peut-être à se relancer en 2011 en surfant sur le boum de la cuisine. Le groupe Schmidt, spécialiste du secteur, a ainsi grandi de 13,2%, soit 64 millions d'euros de plus qu'en 2009.

Côté culture et divertissement, 2010 n'a pas été tendre. Les ventes du secteur sont tombées à 10,59 milliards d'euros (- 1,4%). La Fnac a perdu plus de 4% de ses ventes, tandis que Virgin Megastore a vécu un recul historique de 15,4%. Si amazon.fr affiche une croissance à deux chiffres, c'est, a minima, avec une hausse estimée à 10%, bien loin des croissances ultrarapides des dernières années. « Il y a un véritable effet dématérialisation, prévient Olivier Vialle. Le DVD est à bout de souffle, le CD poursuit sa chute et, alors que 2010 a été une petite année pour les jeux vidéo, il est lui aussi peu à peu gagné par le piratage. » La déroute des produits culturels est-elle une fatalité ? Pas sûr. Relay et France Loisirs ont bien dégagé des croissances de plus de 4%. Et Le Furet du Nord, aux portes du top 100, a réalisé une bonne année. Les Français ont aussi montré leur intérêt pour le sport. Décathlon et Intersport ont réussi à accroître leurs ventes au mètre carré, tout en continuant à grandir.

Sans surprise, l'année a confirmé la bonne résistance des poids lourds du secteur. Même s'ils ont moins investi qu'en 2009, les Celio, Kiabi, Darty ou Leroy Merlin ont profité du regain de la consommation en 2010 grâce aux stratégies initiées dès le début de la crise. Nouveau concept, nouvel assortiment, développement rapide... Tous les moyens sont bons, y compris le rachat d'un concurrent. Après Vêti repris par Kiabi en 2010, Saturn par Boulanger en 2011, qui sera le prochain ? Clairement, Virgin Megastore est à un tournant de son histoire, et son patron, Jean-Louis Raynard, va devoir faire des choix stratégiques décisifs dans les mois à venir. Quant à Go Sport, si son actionnaire est solide (Casino), il n'aperçoit toujours pas le bout du tunnel. Si ces proies sont séduisantes, les prédateurs potentiels devront garder à l'esprit les risques d'une éventuelle rechute de l'économie. « Nous avons assisté à la fin de l'érosion des ventes à surface comparable, mais on ne peut pas encore parler d'un rebond. Les 100 leaders ne " surperforment " pas, avec une croissance de 2% du PIB en 2010 », avertit Sabine Durand-Hayes, de PwC.

 

Source LSA.fr

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